Conférences
…Immédiatement ils encerclèrent les danseurs,
Ils se jetèrent sur l’endroit où se trouvent les tambours
Et ils ont entaillé le musicien qui les jouait,
Ils l’ont coupé les deux bras et après ils l’ont décapité…
Miguel León Portilla
El reverso de la Conquista
Histoire de la Musique Mexicaine
À cause de l’énorme destruction provoquée par les guerres armées et idéologique-religieuses de la colonisation, il nous est impossible de préciser, d’un point de vue historique, l’origine de la Musique Mexicaine ; cependant, les légendes, mélangées aux rituels religieux et aux conceptions astronomiques, ainsi que les écrits de certains historiens, nous donnent une idée de comment la Musique Mexicaine et la danse étaient conçues par les peuples Mexicains de l’ère Précolombienne.
L’arrivée des colonisateurs Espagnols au XVIe siècle, marque l’introduction dans la Musique Mexicaine des instruments à cordes : violon, harpe, guitare, oud, mandoline… Mais il faut tenir compte que dans les bateaux voyageaient non seulement des Espagnols et d’autres Européens, mais aussi des Africains et des Arabes et avec eux, certaines de leurs traditions et des aspects culturels et artistiques… sans oublier des instruments de musique.
L’instrument de Musique Mexicaine qui marquera à jamais le métissage entre les cultures Mexicaines et celles des colonisateurs, est la Concha. Cet instrument possède cinq sets de cordes métalliques doublées, accordées comme une guitare « classique » ; sa caisse de résonance est construite avec la carapace d’un tatou géant et représente ni plus ni moins l’interprétation des Indigènes Mexicains de la mandoline.
Une fois la colonisation perpétrée et les esprits relativement « apaisés » des instruments tels que le violon, la harpe, la mandoline, la guitare, l’oud, ainsi que des percussions africaines se généralisent dans la Musique Mexicaine. Dans chaque zone du Mexique se conçoivent des instruments, des danses, des rythmes et, par conséquent des musiques qui, finalement deviendraient notre Musique Populaire et Régionale. La lutherie prend une place de choix dans la Musique Mexicaine
Le Mexique, étant un pays très vaste, multiculturel dont chaque civilisation possède sa propre langue (se sont des idiomes à part entière et non pas des dialectes), ses propres coutumes, sa propre culture et par conséquent son propre art : il serait impossible d’étudier chacune des régions. Nous allons donc approfondir sur les genres musicaux des trois qui nous semblent, si non les plus importantes, les plus représentatives. de la Musique Mexicaine Sans omettre ce que nous considérons comme notre racine : la musique Précolombienne.
La Musique Précolombienne
Pour essayer d’éviter des confusions, notre point de référence sera la culture Aztèque. Les recherches archéologiques ont donné un élément d’importance capitale permettant l’approfondissement dans l’étude de la musique : les instruments.
D’après les chroniques, les investigations et quelques écrits, nous savons que la musique et la danse étaient indissociables.
Concernant les fêtes qu’ils organisent pour leurs Dieux, il faut savoir qu’ils les célébraient avec solennité et dans la joie. Ils décoraient leurs temples avec beaucoup de gaieté, avec des roses et beaucoup de verdure. Les chants, très solennelles, ainsi que les danses, étaient exécutés avec beaucoup d’adresse et régularité, sans discordance ni dans la tonalité ni dans le rythme. Parce que ceci, est leur principale geste oratoire…
Grâce aux études réalisées sur leur vie quotidienne, nous savons aussi que musique et danse (ainsi que les arts en général), occupaient une place de choix. La musique et la danse avaient une fonction principalement rituelle, elles représentaient un lien entre les humains mortels et éphémères et leurs dieux. Mais nous savons qu’elles étaient très présents lors de festivités destinées tout simplement à l’épanouissement de la population.
Dans le Mexique Précolombien, la musique était interprétée avec un nombre et une variété assez importants d’instruments de percussion, étant les principaux le Huéhuetl : un tambour verticale, dont le tronc – très haut – est finement sculpté avec des motifs rappelant des personnages de la mythologie Aztèque et/ou Maya. Ce tambour était jadis recouverte d’une peau de tigre ou de jaguar et se jouait à mains nues. Le Teponaztli, indissociable du Huéhuetl, est un tambour de forme transversale, taillé dans la masse d’un tronc, généralement en chêne. Dans sa partie supérieure il est coupé de façon à former deux languettes, émettant deux sons différents. Ses extrémités sont sculptées représentant, d’un côté un Chevalier Aigle et de l’autre un Chevalier Tigre.
Les flûtes, en gamme pentatonique, étaient fabriquées en terre cuite, ainsi qu’en ossements humains et animaux ; des sifflets en terre cuite ; des hochets et des grelots, et en fin, une importante quantité d’éléments directement issus du milieu naturel et transformés en instruments de musique. Certains, en forme zoomorphe, servaient à imiter les différents sons de la nature : des oiseaux, le vent, etc.
Le Son Abajeño
Genre musical aussi dansable, le Son Abajeño est le rythme par excellence des orchestres de Mariachis. Le Son Abajeño, de métrique assez complexe qui mélange des mesures ternaires en 6/8 et binaires en 2/4, est né au XVIIIe siècle dans les états de Jalisco et Michoacán.
A ses origines, il était joué par des formations à cordes qui étaient formées par deux violons, harpe à 32-35 cordes (qui faisait aussi office de percussion et de basse) ; par la vihuela, qui est une petite guitare à cinq cordes exclusivement rythmique, avec une caisse de résonance en forme de « ventre ». Et enfin, la guitarra quinta de golpe, guitare de taille moyenne à cinq cordes, indissociable de la vihuela. Ces deux guitares, ont la particularité d’avoir des frets en corde de nylon. Un peu plus tard, arrivera le guitarrón, guitare basse à six cordes épaisses, sans frets qui prend la forme de la caisse de résonance de vihuela mais, forcement, en beaucoup plus volumineux. La formation tel que l’on décrit, est appelée Conjunto de Arpa Grande. Ce n’est qu’au début du XXe siècle que l’orchestre de Mariachi introduit les deux trompettes caractéristiques de ces formations.
L’état de Michoacán est le berceau d’une très prestigieuse civilisation Précolombienne : La culture Purépecha o Tarasca. Sa capitale, Tzintzuntzan (lieu des colibris) s’est établie aux coteaux des collines Yahuarato et Tariacuri, aux bords du lac de Pátzcuaro. Dû à sa situation géographique privilégié, à ses richesses naturelles, ainsi que qu’à la magie et à la puissance tellurique qui émanent de cette terre prodigieuse, il semble logique que depuis « la nuit de temps », cette endroit réunit des artistes, qu’il y a des célébrations, des fêtes. La plus connue est sans doute La Noche de los Muertos (la Toussaint). Cette célébration réunit des danses, des louanges, des chants qui s’effectuent dans les vieux cimetières. Les « vivants » amènent à ses morts les mets et les boissons qu’ils aimaient. Avant de les manger, les enfants jouent avec les petites têtes de mort fabriquées en sucre ou chocolat. On prie, on chante et on danse toute la nuit, et après, on mange tout ce que les gens ont amené. La fête se termine par de rencontres de Bandas et par les bals des Conjuntos de Arpa Grande qui interprètent toutes les musiques de la région : Abajeños, Pirekuas, Sones, etc.
La charmante ville d’Apatzingán, dans la région nommée Tierra Caliente, dans l’état de Michoacán, est la capitale des Conjuntos de Arpa Grande.
Le Son Jarocho
Originaire de la zone sud de l’état de Veracruz appelée Sotavento, le Son Jarocho représente la fusion entre les trois racines du Mexique d’aujourd’hui : l’Indigène, l’Européenne et l’Africaine (inclus le Maghreb) Dans l’histoire du Mexique, l’état de Veracruz (berceau de la très raffinée culture Totonaque) est d’une grande importance car c’est justement dans l’actuelle ville de la Antigua, (au nord-est du port de Veracruz), que les bateaux de Cortés ancreront.
Dans sa métrique, le Son Jarocho peut être ternaire en 6/8, en 3/4 ou binaire en 4/4, très souvent syncopée, ce qui rend la rythmique assez complexe. Une des particularités de Son Jarocho, es que la danse est absolument indissociable de la musique parce que, fidèle à ses origines Andalouses, la danse appelée zapateado, fait aussi office de percussion.
Pour son interprétation et selon la région, sont utilises un nombre important de guitares rythmiques de différentes dimensions appelées jaranas (en générale ce sont des guitares à huit cordes en nylon accordées selon sa région d’origine, et de l’interprète), allant en ordre croissant du chaquiste, mosquito et jaranas première, deuxième, troisième et jusqu’à la guitarra leona ou guitarra de son qui fait office de basse. Le requinto est une guitare de quatre à cinq cordes, de petite ou moyenne taille qui dessine la figure mélodique, lance les reprises et exécute des solos ou chorus. La fusion de rythmes, arpèges, accords et mélodies de ces instruments donnent un exemple clair d’un style baroque. La harpe à 32-35 cordes, est aussi utilisée, sur tout dans le port de Veracruz. Les percussions sont d’origine Africaine : le marimbol (nommé marímbula à Cuba, est une caisse rectangulaire en bois ayant dans sa partie frontale une « bouche » dans laquelle sont placés des lames en acier. Cet instrument fait office de basse ainsi que de percussion. La mâchoire d’âne est un curieux et spectaculaire instrument, il fait office de vibra slap et de güiro à la fois. On frotte les molaires à l’aide d’une baguette fine ou d’un os en alternance avec des coups dans la partie arrière des molaires. On utilise aussi le pandero et le cajón.